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« Coucou »

Roman

(1969)

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Époque 3 de la saga

« La vie nous revient de l'aurore »

 

 

 

 

 

 

Nous sommes à Liège en 1969.

Markus Kuhn, surnommé « Coucou », est un  étudiant en droit brillant. Tout lui réussit, ou presque. Mais derrière la façade, il est torturé par les lourds secrets de son origine maudite. Haine et nouveaux éléments surgissent de son passé et lui explosent au cœur. Il se lance alors sur la piste de son géniteur, mort en 1946.

Sur ce chemin miné qui le conduira de Liège à Bruxelles et aussi dans sa Rhénanie palatine natale, toujours flanqué de Gymtonique, sa fidèle chienne schnauzer, Coucou trouvera plus de questions que de réponses : des trois violeurs de sa mère, qui fut son géniteur ? Celui qu’elle abattit en état de légitime défense ? Ou le second violeur ? Ou alors le troisième homme, le pire des trois criminels, l’ignoble traître et délateur ? Et elle, sa mère, poète et héroïne de la Résistance, qui n’a jamais réussi à l’aimer, si elle avait menti à tout le monde ? Et son père adoptif, qu’il adore, l’ancien colonel de l’Abwehr, quel rôle a-t-il réellement joué dans ce trouble passé ?

 

Troisième volet de la saga d’Ed Nouce, ce roman intimiste traite, de l’intérieur, d’un sujet particulièrement difficile : le SUICIDE. L’auteur nous place d’emblée dans la tête du héros et ce sera notre inconfortable situation jusqu’au bout du livre. Nous aurons accès à cette béance, à ce manque, à ce vide, à ce désir, qui pourrait être selon Markus-Coucou lui-même, ce qu’on appelle l’âme.

Avec un tel sujet, on pourrait craindre un roman sombre et neurasthénique. Mais l’HUMOUR y règne pourtant jusqu’au sein même des sombres labyrinthes où les démons de « Coucou » l’entraînent (et nous avec lui) vers l’abîme…

 

Ceux qui ont déjà lu Ed Nouce retrouveront ses personnages profonds et attachants, que les nouveaux lecteurs découvriront avec bonheur : autour de Markus-Coucou, ses parents : Hélène et Manfred Kuhn, mais aussi Wilhelm et Téri devenus adultes, Horace Smoke-Finch, Axel et Lirane le Vaneau, etc. ; chacun vu ici par les yeux de « Coucou ». Un NOUVEAU regard, révélateur ou déformant, qui renouvelle l’univers de la saga familiale.

 

Un roman poignant, dense, original, toujours écrit dans le style élégant, sensible et poétique d’Ed Nouce, un SUSPENSE PSYCHOLOGIQUE haletant où l’humour demeure sous-jacent derrière des larmes toujours retenues et un drame omniprésent.

Un livre difficile à oublier…

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Extraits de « Coucou »

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Je me nomme Markus Kuhn. Handicap qui ne pèse pas sur les épaules de Wilhelm Kuhn.

Comment mes parents n’ont-ils pas réfléchi plus loin que le bout de leur nez quand ils ont choisi mon prénom ? En vérité, c’est maman la coupable, et papa se sera contenté de ratifier Markus, censé posséder l’avantage d’être à la fois latin et allemand. N’a-t-elle donc pas remarqué que ce satané Markus ne va pas du tout avec le patronyme Kuhn ?

Il suffit de proférer l’ensemble à l’allemande pour s’en convaincre. Markous Koun, c’est horrible : ça fait immédiatement Coucou.

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Les vagues vont et viennent, d’abord douces et tendres. Au gré du flux et du reflux, nous flottons sur leur blanche écume. Elles montent crescendo et nous entraînent, pour s’abattre avec nous, à bout de flots. Et se reforment, plus vigoureuses, et repart le va-et-vient de bas en haut puis de haut en bas.

Tangage, avant tempête qui emporte nos corps tels de frêles esquifs. Fureur sœur d’orage, de bataille, ou des temps immémoriaux du début de la vie.

Hors de moi, je suis la tempête. Mon âme est ce corps éperdu, qui n’agit plus que d’instinct, se précipite, s’abîme, se récupère et se reprend. J’oublie même Lirane, tant elle est mienne, plus que mienne, autre dans laquelle je me retrouve en plus que moi-même.

Soudain, au paroxysme, s’évanouit la tempête, disparaît la houle, se brise la vague, se retire la mer qui m’abandonne sur la plage.

Je ne suis plus que matière, pondéreuse, éreintée, mouillée de sable agglutiné. Sur mes lèvres tout à l’heure affolées, gourmandes, ne demeure qu’un goût amer.

Tout compte fait, après, c’est comme les autres fois.

Ce vilain petit zeste d’amertume dans ma bouche qui n’est plus avide de rien.

Dire que je l’ai tellement désirée, espérée sans espoir ! Lirane, l’inaccessible, la défendue, l’inacceptable, la taboue.

Que la tempête fut incommensurable avec ce que j’ai connu auparavant. De cette passion, j’attendais qu’elle me débarrasse de l’arrière-goût des amours ordinaires.

Ces amies avant et après Lirane.

Qu’est-ce qui les attire chez moi ? La haute taille ? Le sourire prétendument enjôleur que je tiens de ma mère ? On dit que j’ai du charme, comme elle. N’est-ce qu’un terme chic pour sexy ? Loin d’être beau, je suis épais, j’ai ces traits quelconques et cette démarche pesante dont j’ai horreur.

Depuis que je suis à l’université, je me laisse aller à ces plaisirs commodes.

Commodes, à plusieurs sens.

Je n’ai pas à me forcer pour séduire. Et je vais là où l’on m’appelle. Donc aux filles faciles.

Je ne mets rien de péjoratif à « faciles ».

Au contraire.

Je fuis les autres, les dangereuses. Soit trop amoureuses et susceptibles par là de m’attirer des ennuis, soit trop attachantes et par conséquent pires que les premières. J’ai vingt-deux ans. Je ne souhaite pas hypothéquer mon avenir, mes projets, ni me charger d’une famille en aval alors que déjà m’obsède celle en amont.

Le mariage est une chose grave, à toutes les acceptions du mot : austère, sombre, sérieuse, préoccupante, lourde, majestueuse et tragique. J’y songeais pour plus tard peut-être. Beaucoup plus tard.

Mon origine n’est pas étrangère à mon attitude.

C’est évident et j’en suis conscient.

D’abord pour cela que je cueille les nanas qu’on ne doit pas conquérir. Ainsi suis-je certain de ne pas suivre les traces de mon géniteur. Je redoute ce péché originel, et d’emprunter les pas de l’être abject dont la moitié de moi est issue.

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Longiligne, pas vraiment jolie, on la regarde, attiré malgré soi. Ses cheveux blond vénitien sont coupés court. D’hypothétiques exemplaires blancs seraient de toute manière imperceptibles dans cette couleur. Elle a cinquante et un ans. Je suppose qu’elle en paraît moins, car c’est ce que chacun répète.

Comme toujours et aussi loin que je m’en souvienne, il me semble qu’elle est sur scène, et pour jouer le premier rôle. Elle crève l’écran de la vie. Son visage trop expressif est fatigant à suivre. On devine mal ses yeux sous les épaisses lunettes : déformés par l’effet de loupe inversée, ils ont l’air petits. Elle ôte tout le temps lesdites lunettes : de fait, les yeux ne sont pas fameux, le regard est gris et ambre, un peu vague comme souvent chez les myopes, et assez quelconque : j’ai du reste presque le même. Sa voix claire, bien timbrée, porte loin et se module en de nombreuses inflexions, changements de rythme et de ton, qui déforment sans arrêt sa grande bouche et toute sa physionomie. Elle sourit et elle rit trop. Même si son discours est intelligent et spirituel.

Pour une fois, elle n’est pas en pantalon et sacrifie au soleil de ce début juillet. Une robe unie, vert profond et brillant comme le feuillage du charme dans l’ombre d’un soir d’été, juste au-dessus du genou. Depuis qu’une réflexion d’un de mes copains me l’a appris, je sais qu’elle a des jambes superbes et j’y prête une attention critique encouragée par cette tenue. Pourtant, elle est à la mode, et sage, si on compare avec les minijupes que j’apprécie chez les autres femmes.

La dominer de ma haute stature, c’est comme une vaine revanche, déplacée vu qu’avec son mètre soixante-quatorze, elle est nettement au-dessus de la moyenne féminine. Je fus si longtemps un enfant écrasé par sa trop forte personnalité ! Il s’attarde, ce satané gamin rougissant, chevillé à moi. Elle sourit, et ce sourire m’est destiné. Elle ne me regardera pas en face, non, elle joue, elle surjoue même. Elle me félicite, mais ce n’est pas un élan du cœur.

Ma mère ne m’aime pas, elle ne m’a jamais aimé et ne m’aimera jamais.

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Je connais parrain depuis toujours. Il a dû vieillir pendant que je grandissais, mais j’ai l’impression qu’il ne change pas. Allure à la fois sportive et élégante. Soixante et onze balais, en paraît quinze de moins et le sait. Je le soupçonne du reste d’y travailler activement, d’entretenir et de préserver son grand corps musclé. De s’astreindre à des pompes ou des abdominaux, ou les deux, et de surveiller ce qu’il mange et ce qu’il boit. En plus de l’équitation, du polo, du golf et du tennis, qu’il pratique assidûment.

Jamais sans sa canne, manipulée avec une dextérité fascinante. Accessoire à la mode quand il était étudiant à Oxford. Drôle de type, comme le répète papa qui l’aime modérément. Ami intime de maman, pour lequel elle a bossé à Londres pendant la guerre, dans les renseignements militaires. Anglo-écossais : mixture a priori détonante. Sorte de James Bond sur le retour, qui serait homosexuel. Mélange de David Niven et d’Errol Flynn, il ne correspond pas du tout à l’image classique du pédé. J’ai déjà rencontré son petit ami, un dénommé Quico. Lui ne fait pas illusion. Très gentil, d’ailleurs. Talentueux sculpteur sur bois. Aurait exercé une certaine et vieille profession sur les trottoirs de Londres, moins reluisante – et sans mauvais jeu de mots – que son art actuel.

Je suis heureux que mon faux oncle et vrai parrain soit là. Ça me dispense de me retrouver seul avec maman. Et la réciproque vaut aussi pour elle, sûrement. L’humour du Britannique, sa finesse et son affection pour chacun aident à se supporter.

De toute manière, je rentre à Liège dans quelques jours. L’épreuve ne sera pas longue. Et tant maman que moi, nous veillerons à nous éviter au maximum. Par contre, j’ai plaisir à la société de Lord Smoke-Finch. Dire que j’avais cru à une époque qu’il aurait pu être mon géniteur ! C’était avant que je connaisse le lourd secret de mon origine et les préférences sexuelles de mon parrain. Il faut admettre que l’intimité de maman avec lui pouvait prêter à confusion aux yeux d’un adolescent de quatorze ans travaillé par ses doutes et ses questions sans réponse. Mais leur amitié profonde n’est entachée d’aucune équivoque. Et je ne serais pas étonné que Wilhelm, passé maître dans l’art de lire l’âme d’autrui, ne voie juste quand il prétend qu’oncle Horace n’a jamais été amoureux de maman… mais plutôt de papa. Qui le déteste cordialement, bien entendu.

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Pénible conversation avec papa.

Laconique, il l’est plus encore au téléphone.

Oui, il va bien. Oui, il a parlé au commissaire Van Melk et celui-ci nous recevra. Rendez-vous à Liège dans dix-huit jours. Tous les trois : maman sera de la partie. Puisque c’est ton désir, Markus, il faut y accéder. Sachant que rien ne garantit que cela t’apporte les réponses que tu en espères. Au contraire, tu risques de n’obtenir aucune information probante.

Oui, merci papa de t’en être occupé…

Mensonge !

Je déteste qu’il s’en soit occupé !

Je ne lui demande même pas comment il a persuadé Van Melk d’accéder à sa requête peu orthodoxe.

Apparemment, il ne cherchait pas à rencontrer le flic dans mon dos et je l’en avais suspecté à tort.

Nous convenons de nous voir le week-end prochain à Rossberg.

Je n’ai pas envie de grand-chose et sûrement pas de batifoler avec Claire. Chat échaudé craint l’eau froide.

J’évite mes copains. Je m’emploie à repeindre le hall d’entrée de la rue Fusch, gagnant la reconnaissance d’oncle Axel, vu que cet empoté de Georges promet depuis des mois sans jamais s’y décider. Le boulet d’Alphonsine me boude, tout en se félicitant que le travail ne soit plus à faire.

Je me sens plus serein. J’accepte l’inéluctable, cette entrevue à venir, comme un mal nécessaire.

Trop beau pour durer.

Il est dit que mes démons ne me foutront pas la paix !

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Quelque chose me percute. Je me réveille haletant, en sueur. C’est Gymtonique qui a sauté sur mon lit.

Pas question de la chasser, elle m’a ramené au réel et je remercie le Ciel que la scène que je viens de vivre ne soit qu’un rêve. Quelle sorte d’être humain suis-je donc pour que mon inconscient m’adresse un tel cauchemar ? Et surtout quelle espèce de fils ?

Plus moyen de trouver le sommeil.

Je ne peux me détacher du couple maudit qui m’a élevé et que je tends malgré moi à confondre avec les maléfiques amants de mon délire. Je pense à elle. Quels étaient ses sentiments, ses vrais sentiments, envers le colonel Kuhn ?

Parrain m’a toujours affirmé qu’elle aimait l’Allemand, sans l’ombre d’une hésitation. Mais ce n’est qu’une attestation extérieure, sujette à caution. Horace Smoke-Finch est l’ami intime de maman et nourrit pour mon père officiel une véritable dévotion. Il est très capable d’embellir, de bonne foi, ou dans la double et louable intention de ne pas leur nuire et de me rassurer.

Il me faudrait des indices plus probants que les témoignages subjectifs de mon oncle, de la Derman, de parrain, de Madame Goffin ou de mes sinistres démons.

Réinterroger la principale intéressée est irréaliste. Entre maman et moi : un mur, infranchissable pour l’un comme pour l’autre, sans espoir de communiquer.

Donc, je ne saurai jamais.

Car elle seule détient la réponse.   (...)

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Nouvelle couverture

Dans la tête d'un jeune homme au seuil du mortel abîme

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